Hommage à Donatien Laurent
C’est avec une grande tristesse que nous apprenons le décès de Donatien Laurent le 24 mars à l’âge de 85 ans.
Après avoir marqué par son talent musical le renouveau des bagadoù dans les années 1950, il s’est lancé, en précurseur, dans des enquêtes orales sur la tradition chantée de Basse Bretagne. Durant un demi-siècle, il aura été un exemple, pour tous les ethnologues, collecteurs et passionnés des chansons populaires par sa rigueur, sa grande culture, sa philosophie sur la culture populaire. Sa ténacité et son intuition lui ont permit de découvrir les carnets d’enquêtes d’Hersart de la Villemarqué, réalisés vers 1830, et sa thèse sur les sources du Barzaz Breiz, soutenue en 1978, va marquer l’histoire de la culture populaire bretonne – mais toutes ses enquêtes, croisant enquêtes de terrain et recherches en archives, font référence, tant en France que dans toute l’Europe.
Chercheur universitaire, ethnologue au C.N.R.S., il dirigea pendant douze le Centre de recherche bretonne et celtique de l’Université de Brest (19876 1999), sans jamais cesser d’accompagner ceux qui défendent la culture bretonne : “Langue et tradition sont inséparables. Une Bretagne sans breton populaire ne se conçoit pas “. Il contribua à la découverte par le grand public des “princes de mémoire” qui l’avaient marqué – selon le titre d’un article rendant hommage à Maryvonne Goadec, dans le premier numéro d’ArMen (1986), une revue consacrée à la Bretagne qu’il aida à fonder.
Donatien Laurent a rejoint à son tour ces “princes de la mémoire”. Il nous laisse des études sur des chansons qui se lisent comme un roman – c’était un excellent conteur de ses propres aventures d’enquête – et un vaste ensemble d’archives orales récemment numérisé par l’association Dastum et consultables sur le site Dastumédia (http://www.dastumedia.bzh/).
Michel Colleu et l’équipe de l’OPCI
photo : extrait de l’article La gwerz de Louis Le Ravalec, par Donatien Laurent, ArMen n° 7, 1987. Le chercheur en enquête à Langonnet, recueillant des témoignages sur un meurtre commis en… 1732 dont l’histoire était encore chantée de tradition orale en 250 ans plus tard. Photo Michel Thersiquel/ ArMen