EnquêtePCI

Les usages contemporains de la rivière Mayenne, l’enquête de l’OPCI continue…

La rivière, le paysage, dans le Patrimoine Culturel Immatériel

Depuis 2021 nous nous interrogeons sur la place de la rivière au sein des activités culturelles, sportives et festives du territoire mayennais (53)…

Les Mayennais sont, par le biais de leurs différents métiers et activités, les observateurs et usagers privilégiés de ce cours d’eau tumultueux en recréation constante. Ils possèdent cette identité et cette mémoire commune autour de la rivière qui sépare leur département du nord au sud. Ils peuvent en profiter à vélo, en bateau sans permis, en bateau de croisière, en péniche, en kayak, en aviron, ou simplement en cheminant à pied pour observer les différents moments de son rythme hydraulique.

Les événements climatiques récents (inondations, sécheresse, canicule) ont eu une incidence sur la façon dont les Mayennais vivent leur rivière. Les usages ne sont déjà plus les mêmes que dans les années 1980 ou 2000, et cette vision plus récréative de la Mayenne va continuer à s’accentuer tout en attirant de nouveaux habitants.

À l’instar de la Loire et de son inclusion à l’UNESCO, qui en fait un patrimoine à la fois reconnu, protégé et valorisé, l’inventaire descriptif des différents usages contemporains de la rivière Mayenne, mené par Marjorie Ruggieri, anthropologue à l’Office pour le Patrimoine Culturel Immatériel, permet d’envisager une véritable politique de mise en tourisme et de protection autour de la rivière.

Le regard des photographes contemporains sur la rivière

Après avoir interrogé les usages sportifs (triathlon, marathon des écluses), festifs (guinguettes, OFNIJEC, fête du pain et course de baignoire de Ménil), techniques et touristiques (agents techniques de l’eau et éclusiers du département), la collecte de mémoire se poursuit auprès d’autres observateurs et acteurs de la rivière…

Les représentations et imaginaires relatifs à un paysage et en particulier à une rivière proviennent souvent d’archives iconographiques relatifs à des peintres ou des photographes qui l’ont magnifiée. Inversement, les usages contemporains nourrissent l’inspiration des photographes mayennais réunis dans divers clubs photos (le Kiosque à images à Château-Gontier, Laval Image, le Club Photo, Cinéma et Vidéo de Changé, le Club photo de Aron…). De leurs photographies naissent ensuite de nouvelles représentations de la rivière (sauvage, romantique, sportive, naturelle, bétonnée…) (Bertho et Conesa, 2017). Il est donc important de se demander comment eux aussi s’intéressent et s’approprient ce patrimoine naturel.

Le livre d’Eric Médard apporte une première réponse à travers des photos très romantiques et une vision mystérieuse de la rivière, vidée de ses habitants, de ses usagers, devenant presque fantomatique (Médard E., les plus beaux paysages de la Mayenne panoramiques, 2022). Le photographe qui a arpenté de long en large son département explique avoir eu « besoin de longer ces petites rivières perdues au fond de rives escarpées, oubliées des hommes car indomptables.». C’est donc ce qui anime les photographes, se lever à l’aube ou être sur place à l’heure bleue, sillonner le département de petits ruisseaux en petits ruisseaux, ceux-là même qui se jettent ensuite dans la Mayenne, chercher un recoin encore immaculé, loin de son appropriation par l’homme.

D’autres photographes partagent cette vision et cette ode à la lenteur et à l’aspect sauvage et paisible de la rivière pourtant dynamique et domptée par les hommes. Si de temps en temps, les photographes acceptent la présence humaine, le paysage mis en lumière est donc surtout lunaire, brumeux et énigmatique.

Pêcheur sous le pont de Chambellay, photo de Guy Bernet (le Kiosque à Images), juillet 2018

En octobre 2023, l’APCVC réalise une exposition sur la thématique de la rivière. Plus de 800 visiteurs enthousiastes sont accueillis sur un week-end. Les photographies montrent la rivière dans toute sa splendeur, sans hommes : « c’est le cours naturel, sauvage, sans aménagement, l’aspect initiale de la rivière qui me plaît et puis pas besoin de demander un droit à l’image à un oiseau !» déclare Roger Fremont, un des photographes.

Photo Roger Fremont, club APCVC, photo prise le 12 mars2022 à l’écluse des Communes. Martigné en aval du pont de Montgiroux. Rare lieu où sur le cours de la Mayenne des rochers affleurent.

Les premiers résultats de l’enquête

Même si l’enquête se poursuit jusqu’en 2024, les premiers entretiens montrent que divers usages plus ou moins récents viennent alimenter les représentations de la rivière et permettre sa valorisation. Les événements organisés sur ou en bord de Mayenne viennent ponctuer l’animation du Département chaque année. Si certains ont une portée régionale voire nationale (Triathlon de Laval, illuminations de Noël sur l’eau) la plupart constituent des animations locales. Leur réalisation est essentielle, elle permet de valoriser la rivière, de susciter l’intérêt. Souvent dédiées au sport ou à une démarche artistique, les participants se limitent en général à un public restreint déjà sensibilisé aux attraits et aux problèmes de la rivière. Le nombre de manifestations démontre une capacité d’organisation mais l’absence de coordination sur le linéaire fluvial. L’absence d’analyse sur la participation, laisse une impression « d’entre soi » éloignée de toutes perspectives patrimoniales et touristiques. Les photographes participent à la diffusion et à la valorisation de ces évènements en tant que patrimoine immatériel mais leur propre tri et le choix de ce qui est montré créent de nouveaux usages de l’eau (expositions de leurs photos le long de la rivière qui incitent à la contemplation et à la promenade au fil de la rivière, observation plus lente de l’eau…).

A suivre…